Architecte original, Salingaros a publié une théorie de l'architecture basée sur les mathématiques. Il s'inspire des fractales pour proposer des édifices en harmonie avec l'environnement.

La théorie de l'architecture

Fils d'un compositeur grec, Nikos Salingaros voit le jour à Perth en Australie. Il entame ses études dans le domaine de l'art mais se tourne rapidement vers les sciences, qu'il étudie à Miami (Floride) où sa famille s'est installée. Il obtient un poste en mathématiques à l'université de San Antonio au Texas. Il se lie d'amitié avec un architecte, Christopher Alexander, ce qui le pousse à développer des théories alliant les mathématiques et l'architecture.

Il publie en 2006 A Theory of Architecture (ISI Distributed Titles), ouvrage dans lequel il expose différentes « lois », appuyés sur les mathématiques, que doivent appliquer les architectes pour obtenir des édifices dans lequel les individus se sentent bien. « A Theory of Architecture démontre comment les mathématiques et les sciences sociales offrent les clés de la conception d'une architecture humaine » affirme-t-il. Il s'oppose à la rupture que proposent de nombreux théoriciens de l'architecture, comme Le Corbusier, mais aussi au déconstructivisme ; il insiste au contraire sur la continuité, expliquant que par le passé, les lois qu'il a mises en exergue avaient été inconsciemment utilisées.

 

Du nombre d'or au nombre e

Selon Salingaros, une construction agréable à vivre répond au respect de certaines proportions, non seulement sur les dimensions comme la longueur et la largeur, mais surtout sur les dimensions et les formes respectives du bâtiment lui-même, de ses ornements, de la structure même du matériau utilisé. Il parle d'« architecture fractale » en référence aux structures introduites par Benoît Mandelbrot, comme le flocon de Von Koch, dans lesquelles les motifs se répètent à l'infini avec un rapport de proportionnalité constant de l'un au suivant.

 

Mais quel rapport choisir ? Le Corbusier utilisait le nombre d'or  dans son fameux Modulor. Salingaros estime que ce rapport est trop petit et préconise le nombre e = 2,71828… Il constate qu'en rayant un terme sur deux dans la suite de Fibonacci (1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 35…), soit 1, 3, 8, 21, 56…, on obtient à peu de choses près des résultats similaires. Ceci s'explique par le fait que dans la suite de Fibonacci le rapport de deux termes consécutifs converge vers le nombre d'or, dont le carré vaut 2,618…, assez proche du nombre e.

 

Hasard et harmonie

L'harmonie d'un bâtiment est souvent conçue comme l'invariance par certaines transformations simples de l'espace. Ainsi, on retrouve des symétries dans de nombreuses constructions et la régularité des éléments de l'édifice (par exemple les fenêtres) découle de translations. Autrefois, l'absence de symétrie était due à des contraintes spécifiques pour des besoins fonctionnels ; ces « irrégularités » ne sont en rien dues au hasard.

Certains architectes, pour donner plus d'originalité à leurs constructions, ont utilisé des méthodes aléatoires pour concevoir leurs édifices. Ceci s'applique tant au bâtiment lui-même qu'aux ouvertures ou aux éléments décoratifs. En réalité, sous le nom de hasard, c'est un désordre savamment étudié que nous livrent ces architectes. Le plus célèbre d'entre eux est le Belge Lucien Kroll, né en 1927, qui construisit La Mémé, c'est-à-dire la maison des étudiants en médecine sur le campus de l'université catholique de Louvain ; pour lui, « l'habitation est une action et non un objet ».

 

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