Vous êtes sur une plage de Bretagne, au soleil. Vous observez le tracé de la côte, du moins ce que vous en voyez de votre emplacement : les rochers qui bordent la plage, les baies et les pointes. Une route suit la côte, mais elle prend des raccourcis entre deux baies ; vous en apercevez tout au plus une quinzaine de kilomètres de part et
dʼautre de votre position. Mais si lʼon suit la côte à pied, en longeant la mer, combien parcourrait-on entre les deux points extrêmes offerts à votre vue ? Beaucoup plus, certainement. Et quʼen serait-il pour une fourmi, qui elle aussi longerait le bord de lʼeau (en faisant ici abstraction de la question du ressac et des marées qui rendent la limite mer–terre très fl uctuante) ? Le tracé de la côte de Bretagne fut une des sources dʼinspiration de Benoit Mandelbrot (voir Tangente 138) pour créer les fractales, objets mathématiques présentant des propriétés dʼautosimilarité, ou dʼinvariance dʼéchelle. Une image du tracé de la côte sans autre indication ne permet pas de déterminer son échelle. Mais, comme tout modèle mathématique, la vision dʼune côte comme une fractale ne colle avec la réalité que dans un certain intervalle. À lʼéchelle atomique, un tel modèle nʼa évidemment plus aucune signifi cation. On associe généralement aux fractales une dimension dʼhomothétie, qui est généralement non entière. Prenons ainsi la courbe de von Koch (voir Tangente 128).
À chaque étape, chaque pointe subit une homothétie de rapport 1/3 tandis que le nombre de segments de la courbe est multiplié par 4, la longueur de la courbe étant par conséquent multipliée par 4/3. La dimension fractale de cette courbe sera défi nie comme le nombre réel d tel que 4 = 3d. Une côté relativement découpée comme celle de Bretagne a une dimension fractale comprise entre 1,25 et 1,40.
Calculez la dimension fractale d du fl ocon de von Koch. Comparez cette dimension avec celle dʼune côte découpée comme celle de Bretagne.
Un séjour à la plage peut nous inspirer dʼautres idées en observant tout simplement… le sable. Archimède sʼest déjà posé le problème de majorer le nombre de grains de sable qui empliraient lʼunivers. Dans son ouvrage lʼArénaire, le savant voulait démontrer que ce nombre était fi ni, bien que très grand (voir Tangente 150). Dʼautres ont tenté de comparer le nombre de grains de sable sur la Terre et le nombre dʼétoiles dans lʼunivers observable. Là encore, il faut modéliser la situation. Le nombre dʼétoiles observables peut sʼévaluer ainsi. On peut dénombrer environ 400 milliards de galaxies, une galaxie contient un nombre dʼétoiles de lʼordre de 250 milliards. On arrive ainsi à un nombre potentiel dʼétoiles de lʼordre de 1023. Lʼestimation du nombre de grains de sable sur la Terre nʼest pas plus facile ! Déjà, la dimension des grains de sable nʼest pas du tout uniforme (le diamètre des grains dʼun sable très fin peut varier de 0,02 mm à 0,2 mm, et atteindre 2 mm pour des sable plus grossiers). Entre le volume dʼun grain de 0,02 mm et celui dʼun grain de 2 mm, le rapport est de un à un million ! Par ailleurs, il est diffi cile dʼévaluer le volume de sable à la surface de la Terre, rivages marins et déserts confondus. Si les grains de sable étaient sphériques et calibrés, on pourrait en évaluer le nombre dans un mètre cube bien tassé. Depuis la démonstration de la conjecture de Kepler, on sait en effet quʼun empilement de sphères identiques occupe au maximum un pourcentage de lʼespace égal à 100 π / (3√2), soit environ 74 %. Mais en réalité, un sable bien tassé peut occuper bien plus, les petits grains comblant les vides entre les gros…
SOURCES
Y a-t-il autant dʼétoiles dans lʼunivers que de grains
de sable sur Terre ? Sur le blog Science étonnante
de David Louapre.
o Y a-t-il plus dʼétoiles que de grains de sable ?
Vidéo du 11/02/15 disponible sur le site de la radio
Europe 1.